Chez nous, au Tchad, le jour où un élève décroche son baccalauréat, il reçoit d’abord, par l’intermédiaire de ses parents, le coup de fil d’un oncle au village ou en ville pour lui proposer sa fille à mariage. Ensuite, la famille et l’entourage après l’avoir félicité, embrassé, l’interrogent : Tu as obtenu un Baccalauréat scientifique (D) ou littéraire (A) ? Je vous assure que pour celui qui a décroché un bac littéraire, cette question est plus difficile que le sujet de philosophie et de littérature réunis.
Savez-vous pourquoi ils posent cette question ?
Nos parents n’aiment pas l’hospitalisation. Passer deux jours ou plus à l’hôpital, c’est pénible ! Donc, ils font toujours recours à ceux qui ont décroché leur bac D (et qui ont étudié la médecine ou non) pour leur injecter quelques ampoules d’ARTEMETHER en cas de paludisme. Vous comprenez pourquoi, il est impérieux d’étudier la médecine chez nous.
Pauvre de moi ! J’ai décroché un Baccalauréat A. Un bac sans valeur aucune importance aux yeux de mon entourage.
J’ai commis une erreur fatale
J’aurais dû choisir la série scientifique comme mon voisin du quartier avec qui, nous avions décroché le baccalauréat la même année. Mon voisin était encensé avec tous les honneurs dus à son rang (de scientifique). Mais moi, j’étais devenu trop petit. La honte ! L’entourage me projetait un regard rieur, moqueur. J’interprétais leur regard par ce termes : « Un bon à rien ! En quoi peut-il nous servir avec son Bac-A-ordure ? »
C’était du passé…! Car après ce calvaire, j’ai pu m’inscrire en fac de Droit où, au bout de trois années de durs labeurs, je suis sorti nanti d’une Licence en droit public et techniques juridiques. BRAVO !!!
Mais le cauchemar continue…
Ce diplôme littéraire, au lieu de m’ouvrir la porte d’une chancellerie tchadienne à l’étranger ; me permettre ainsi de réaliser mon rêve de devenir diplomate (sans veste), m’a juste conféré le titre de licencié. Et la suite…C’est le chômage ! Cette fois-ci, c’est une Licence (permis) d’explorer le monde du chômage que mon université m’a octroyée.
La validité de cette licence d’exploration était de 3 ans : de 2016 (année de l’obtention de ma licence) à 2019 (promesse du président de la République de recruter 20 000 jeunes à la Fonction Publique en 2020). Bingo !!! Fini, le chômage.
Et comme je l’ai susmentionné, notre société privilégie les scientifiques médecins car des milliers des médecins ont été intégrés au corps des médecins à la Fonction Publique. Mais nous les littéraires : juristes, géographes, historiens, vaut-rien, etc. étions priés d’attendre 2020 pour être intégrés. Mais l’année 2020, l’année de notre « délivrance » essouffla un vent lugubre, infligeant ainsi un coup mortel à la promesse présidentielle. La promesse est jetée dans les oubliettes car la priorité maintenant c’est…
Coronavirus
Coronavirus a déchiqueté mon espoir. Je me retrouve désormais avec un espoir en lambeaux.
Avec Covid-19, les scientifiques sont davantage prisés par le gouvernement. Même le breveté qui a suivi une formation en secourisme est plus important que moi (le simple littéraire) en cette période covidée.
Alors, avez-vous des suggestions à me faire, à part la sensibilisation de la population et la distribution des masques pour me rendre utile en valorisant mes diplômes littéraires ?
En attendant vos suggestions en commentaire, je vous remercie de m’avoir prêté yeuoreilles attentives.
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